Histoire de rues : l'avenue Aimé-Césaire
Le 02/06/2020 à 16h21 par Penthinum

Situation

Quartier des Courtillières. Début avenue de la Division-Leclerc / Fin rue Averroès

 

Création

L’avenue est créée lors de l’édification du quartier des Courtillières dans les années 1950, sur le tracé du chemin des Courtillières dont l’existence est attestée depuis le début du XIXe siècle.

 

Origine de l'appellation

L’avenue des Courtillières, du nom d’un petit insecte de jardin ravageur, a été renommée avenue Aimé-Césaire le 23 mai 2017. Hommage est ainsi rendu au célèbre écrivain et homme politique français, anticolonialiste résolu, fondateur du mouvement littéraire de la négritude.

 

Bref historique

Les fouilles archéologiques sur le site de la Vache-à-l’aise ont montré qu’au IVe siècle avant notre ère, des Gaulois vivaient dans le secteur des Courtillières. Cette implantation n’a toutefois pas perduré dans cette zone champêtre traversée par le ru de Montfort.

Entre le milieu du XIXe siècle et les années 1930, alors qu’il est majoritairement constitué de terres agricoles, le quartier change de visage avec la construction du fort d’Aubervilliers, l’ouverture du cimetière parisien puis l’implantation de l’imprimerie de l’hebdomadaire L’Illustration.

Après le second conflit mondial, la France est confrontée à une grave crise du logement du fait des destructions et de la vétusté du parc immobilier. Durant l’hiver glacial de 1954, de nombreux sans-abris meurent. L’abbé Pierre lance un appel à la générosité et aux hébergements. En réponse, la construction d’une cité d’urgence de 150 logements est actée. Le choix du terrain permet la découverte, sur l'ancienne zone de servitude militaire du fort d'Aubervilliers, d’une réserve foncière importante.

Un projet d’envergure est alors confié à l’architecte Émile Aillaud : dessiner un nouveau quartier. Il conçoit pour la future SEMIDEP (société d’économie mixte du conseil général de la Seine) et l’office HLM de Pantin une « cité-parc » de 2 033 logements. Traversé par l’avenue des Courtillières, le Serpentin, immeuble sinueux de plus d’un kilomètre de long, entoure un vaste parc paysager de 4 hectares. Visibles en partie depuis la même avenue, neuf tours en tripode et deux bâtiments bas sont également construits. Les sites des Fonds d’Eaubonne et du Pont-de-Pierre, plus éloignés de l’avenue des Courtillières, seront érigés jusqu’en 1966.

Les premiers habitants, en majorité des jeunes ménages actifs quittant pour la plupart leurs logements insalubres de Paris ou de Pantin, s’installent dès 1958 dans des logements qui incarnent confort et modernité. La cité des Courtillières, surnommée « Manhattan à Pantin » par Le Figaro, accueille aussi d’autres banlieusards, des provinciaux, des populations immigrées provenant principalement d’Espagne et d’Afrique du Nord, ainsi que des rapatriés d’Algérie et de Tunisie.

Jouissant d’une bonne réputation, apprécié pour ses commerces, ses équipements publics et l’aménagement de ses espaces, le quartier demeure néanmoins mal desservi par les transports en commun. La gestion de la cité, complexe en raison de la multiplicité des acteurs, devient conflictuelle quand s’y imbriquent des considérations politiques nationales, régionales et locales, sur fond de rapports complexes entre Paris et la banlieue rouge. Les résidents les plus aisés partent, accédant à la propriété dans des quartiers pavillonnaires. La hausse du chômage, renforcée localement par la désindustrialisation, entraîne une paupérisation des habitants. Malgré l’arrivée du métro en 1979 et des programmes d’isolation thermique des tours, l’entretien du bâti du Serpentin par la SEMIDEP est délaissé et l’image du quartier se dégrade.

Au début des années 2000, après la cession par la SEMIDEP de ses logements à l’OPHLM de Pantin, d’importants travaux de requalification sont lancés.

L’agence AUC est nommée architecte-urbaniste en chef du projet de requalification du quartier et de l’ensemble des espaces publics, hors parc. L’agence RVA, elle, est chargée de la réhabilitation et de la résidentialisation du Serpentin, dont deux segments sont démolis. Le parc est réaménagé par le paysagiste Vincent Pruvost, tandis que la restauration de la façade, aujourd’hui constituée d’une mosaïque de 32 millions de carreaux d’émaux de verre, est imaginée par le graphiste Pierre Di Sciullo. L’ensemble a reçu le label Patrimoine du XXe siècle en 2008, dix ans avant l’achèvement des travaux.

 

Lieux et bâtiments remarquables

Porte d’entrée du quartier des Courtillières, la maison de quartier occupe la parcelle trapézoïdale à l’angle de l’avenue Aimé-Césaire et de la rue de la Division-Leclerc. En 1982, dans un contexte de dégradation du cadre de vie, la municipalité cherchant des solutions pour retisser le lien social et renforcer la proximité des habitants avec les services municipaux, ouvre une maison de quartier aux Courtillières. Un nouvel édifice, conçu par l’architecte Suzel Brout, est bâti en 1998, à la fois représentant de l’institution communale et équipement de proximité dévolu aux activités socio-culturelles. Bâtiment « carrefour », l’édifice de plus de 2000 m², accueille une mairie annexe et centre social, une bibliothèque, une halte-jeux, une antenne jeunesse, une salle de restauration, un café sans alcool ainsi que des espaces dédiés aux associations et aux activités polyvalentes.

L’édifice apparaît comme un ensemble compact mais subdivisé en deux parties reliées par un hall central assurant la distribution sur les trois niveaux du bâtiment. En revisitant le vocabulaire de l'architecture moderne (toit-terrasse, façade non porteuse, plan ouvert, fenêtres horizontales), Suzel Brout confère à cette maison de quartier un caractère classique intemporel dans un environnement hétéroclite marqué par des architectures diverses.

 

Située au cœur du parc paysager, enveloppée par le Serpentin, la crèche est particulièrement remarquable. Pensée en même temps que le grand ensemble des Courtillières par l’architecte Émile Aillaud, elle est inaugurée en octobre 1961.

En forme de fer à cheval, le bâtiment de plain-pied est organisé autour d’un patio et peut se décomposer en six corps, associés à différentes fonctions et de formes architecturales différentes. À son origine, il abritait une crèche, une garderie, un centre de PMI (protection maternelle et infantile) et des services communs telles les cuisine, biberonnerie, buanderie et chaufferie.

Le monde organique et le milieu naturel sont au cœur du projet architectural d’Émile Aillaud. D’une géométrie curviligne, avec ses courbes et ses contre-courbes, le bâtiment n’est doté d’aucun angle droit. La série de coques rappelle les vagues ondoyantes, qui, associées aux façades transparentes, créent l’illusion d’une volumétrie sans rupture avec l’extérieur. En outre, les détails, décors et vitraux du plasticien Fabio Rieti, gendre de l’architecte, évoquent l’univers marin.

 

Troisième équipement public de l’avenue, le centre de santé Maurice-Ténine – du nom du docteur Maurice Ténine, élu communiste à Antony, résistant et fusillé en 1941 – s’inscrit dans le renouvellement urbain du quartier des Courtillières. Initialement situé rue Édouard-Renard, en rez-de-chaussée du bâtiment surnommé le « Gouffre », le CMS Ténine est intégré en 2008 dans un nouveau bâtiment au 7 de l’avenue, au cœur de la nouvelle centralité des Courtillières.

Conçu par les architectes Hamonic et Masson, le bâtiment est mixte, associant le centre de santé, le centre médico-psycho-pédagogique (CMPP) et 36 logements sociaux.

Il est scindé en trois parties. Le socle, réservé au programme médical, est largement ouvert par des grandes façades vitrées, exprimant les idées d’accueil et de proximité propres aux équipements publics. Les deux blocs de logements sont identifiés par leurs balcons en tôle métallique perforée, saillants sur la façade est, côté avenue, comme en représentation, et accueillant chacun un bac pour recevoir un arbuste, filants et protégés par des vues sur l’autre face. Le choix de la polychromie - marron des bardages, vert des salles d’attente et lasure violette des rampes de parkings - et le détournement de produits du catalogue des industriels entendent briser les codes architecturaux traditionnels tout en faisant du bâtiment un ensemble « rationnel, fonctionnel, non ostentatoire ».

 

Dernière opération de la requalification du quartier, la parcelle face au CMS accueillera l’équipement culturel Nelson-Mandela (bibliothèque, ludothèque, salle de diffusion, théâtre de verdure) imaginé par le cabinet Jean-Pierre Lott, faisant de cet espace la plaque de centralité des Courtillières.

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