Sans titre
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Cote :
OAP/218
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Dates :
2010
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Format :
Dimensions : 66x54 cm
Genre/Carac. phys. : gouache sur papier
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Biographie ou historique du producteur :
LA BIO
Né en 1970, Benoît Manent vit et travaille à Montreuil. Il expose en France depuis les années 1990.
LA DÉMARCHE ET L'ŒUVRE
Benoît Manent travaille d'après photo, et ce, dès ses premières toiles. Réalisées à l'huile, ces premières œuvres que l'on qualifie de photo-réalistes proposent néanmoins des modelés très travaillés, permettant une certaine mise à distance de l'image de départ. Le caractère intime présent dans ces propositions revêt un anonymat étrange, faisant que l'on se prend à s'identifier à ces images.
Petit à petit, le caractère intime et personnel des compositions est évacué. Manent travaille désormais à l'acrylique ainsi qu'à partir de vidéos où apparaissent des personnages qui effectuent des mouvements simples, des « gestes élémentaires » pour reprendre les termes de l'artiste. Un corps allongé qui roule sur le sol, une personne qui tourne autour d'une chaise. Pour que l'intime s'efface, le contexte doit disparaître. Dès lors, les personnages n'évoluent plus dans un lieu défini, mais dans un espace indéterminé : un fond uni entoure les figures, et celles-ci semblent alors flotter dans la couleur. L'artiste va plus loin : il efface le visage, plongeant encore un peu plus ses personnages dans l'anonymat.
La résidence qu'effectue Benoît Manent à Beauvais en 2008 est un moment important de l'évolution de son œuvre. C'est en effet en y démarrant la série Ronde que l'artiste développera son sujet unique des corps entrelacés. Dans cette série, deux personnages reviennent inlassablement, dansant dans des espaces de couleur aux tons bleus. Partant de L'Histoire du soldat de Stravinski et Ramuz, l'artiste cherche pourtant à réaliser une peinture non narrative où la figure n'apparaît que pour elle-même. Le fond à la couleur unie, toujours présent, devient alors un espace qui dévore les corps, les figeant dans l'expression d'un instantané du mouvement de ronde. Œuvre nourrie de peinture, celle de Benoît Manent trouve un écho dans Le Fifre de Manet où la figure centrale, traitée dans un langage plastique simplifié, se retrouve entourée d'un gris presque uni, espace sans profondeur découpant le musicien.
Après la danse, les corps s'enlacent par amour. La photo est à nouveau au départ de l'œuvre. D'abord à l'acrylique, avec des figures faites de couleurs primaires semblant presque perdues dans l'espace du format. Puis l'artiste passe à la gouache, travaillant alors sur papier. La peinture est appliquée de manière très liquide, la coulure (qui jusqu'à présent était volontairement retenue) faisant son apparition. Ce changement de technique et de support lui permet de travailler plus vite. Beaucoup de compositions sont alors détruites au cours du processus, dans un travail d'élimination qui trouve une résonance dans cet effacement des détails à l'œuvre depuis le passage à l'acrylique. Dans cette série, Love, c'est une masse grise qui entoure les corps. Petit à petit, elle se réduit. Ou plutôt, le cadrage se resserre. Progressivement, les figures entrelacées apparaissent presque confinées entre les limites du format, marquées par le cadre de l'œuvre dont l'artiste se sert. Le fond gris, mat et opaque, est appliqué après les personnages. Il vient les découper, les enserrer, les immobiliser. Quant aux figures, il devient difficile de les nommer « personnages ». Si les corps sont toujours le sujet de l'œuvre, les détails sont tellement noyés par la matière liquide que l'on se retrouve face à des masses, à des tâches de couleurs qui se mélangent les unes aux autres. Il n'est pour autant pas question de parler d'abstraction, bien qu'un certain imaginaire soit libre de se constituer devant les compositions. Il s'agit de retrouver un côté physique, physiologique même, à l'enchevêtrement des corps : l'artiste cherche une sorte de flou in utero, fait de fluides corporels et où la chair reste une présence implacable, marquée dans son œuvre par l'apparition de ces bras dont la matière tranche vivement avec le traitement de l'ensemble.
Le mouvement progressif vers des formes toujours éloignées de l'image de départ, noyées dans la matière liquide, effacées par le pinceau qui les crée en même temps, se rapproche d'une sorte de recherche de vérité essentielle des gestes du corps. Les masses sont débarrassées de leur identité, dans une volonté de simplification qui trouve ses sources dans le monde de l'enfance. Fasciné par les contes et l'imaginaire enfantin, il s'agit pour l'artiste de partir sur les traces de ce regard encore innocent à travers des jeux de couleurs et de formes où l'on décèle des figures effrayantes.
POUR ALLER PLUS LOIN
instagram : @benoitmanent
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Modalités d'entrée :
Achat à l'artiste dans son atelier à la Sernam à Pantin, en 2010.
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Documents en relation :
OAP216 et OAP217