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Le message sur cette photographie est double. Au-delà de la victoire sur la misère, les bombardements anglais sont dénoncés et le V des doigts de l'enfant symbolise aussi une bataille de signe. Dès janvier 1941, à la radio de la BBC le symbole du V devient signe de lutte contre l'occupant en référence à la première lettre du mot Victoire. Ce signe est repris à travers l'Europe occupée et devient un signe anti-nazi. Les Allemands lancent une campagne de propagande réutilisant le symbole, autour du mot allemand Viktoria, afin de contrer le « V » des alliés, sans y réussir.

En relayant le message du Maréchal, cet appel à la solidarité est dans le même temps une propagande insidieuse en sa faveur. Jusqu'à la Libération, pas une affiche, pas un film, pas un reportage radio consacré à l'action sur le Secours national ne sera réalisé et diffusé sans qu'y soit associée l'image de Pétain.

Le 24 octobre 1940, Philippe Pétain rencontre Hitler dans la gare de Montoire-sur-le-Loir. Une poignée de main très médiatisée célèbre officiellement la « collaboration » entre la France vaincue et l'Allemagne triomphante. Quelques jours plus tard, comme à son habitude, le Maréchal s'en explique à la radio.

Le Service civique rural pour les jeunes, mis en place en mars 1941, est une des principales mesures qui tente d'enrayer l'hémorragie des campagnes et le manque de main-d'œuvre masculine. La jeunesse fait l'objet d'une attention toute particulière de la part du régime de Vichy qui souhaite la contrôler pour mieux la diriger. Les structures d'encadrement sont nombreuses : anciens mouvements (scouts, éclaireurs...), mouvements engagés (Jeunesses populaires françaises, Cadets francistes...) et enfin les deux grandes organisations fondées en juillet 1940 par le gouvernement : les Chantiers de jeunesse et les Compagnons de France. D'après l'historienne Michèle Cointet, la moitié des 5 200 000 jeunes de la tranche 14-21 ans sont affiliés à un mouvement.

Les besoins sont immenses. Pour soutenir l'action de proximité autant que pour la surveiller, le Secours national et l'Entraide d'hiver (sa structure parisienne) ouvrent des maisons ou des bureaux locaux. En 1943, le Secours national emploie plus de 1 000 personnes à son siège parisien et le nombre de bénévoles est de 42 962.

Vichy est très attentif à l'Empire qui fera l'objet de plusieurs grandes campagnes spécifiques. Une des thématiques est celle de l'interdépendance développée sur l'affiche qui en filigrane prône l'unité. Cette affiche, présentant la journée nationale nord africaine de collecte de textile, a été apposée en zone occupée. 24 525 affiches 80x120 cm pour 25 000 livrées et 99 101 affiches en 60x80 cm pour 100 000 livrées sont imprimées par l'Imprimerie générale de Grenoble. Il y aurait aussi eu 200 000 affiches 30x40 cm imprimées.

L'affiche se partage entre une phrase et un dessin. Ce dernier présente une symbolique élémentaire : Pétain, très reconnaissable, salue l'ouvrier qui lui, au contraire, ne possède aucun signe particulier afin de représenter tout le prolétariat. Cette poignée fraternelle scelle la réussite industrielle du pays, illustrée au second plan. La Francisque est entourée de l'inscription « 1er mai - fête du travail ». Elle symbolise ici l'unité française. La répétition du texte de l'affiche 1Fi/274 quant à elle martèle la loyauté du Maréchal vis-à-vis du peuple français. Cette campagne de propagande est la plus importante de l'Occupation. Les trois affiches 1Fi/274, 1Fi/275 et celle-ci, conçues comme une trilogie en l'honneur du travail et de la solidarité sociale, sont tirées à plus de trois millions d'exemplaires. La vente par les enfants d'insignes et la distribution gratuite à la population ouvrière de plaquettes du discours de Saint-Étienne complètent le dispositif de promotion.

Le texte de l'affiche est un extrait du message du Maréchal Pétain aux ouvriers, techniciens, patrons français déclamé à Saint-Étienne le 1er mars 1941. Ce discours, qui récuse la lutte des classes et encourage la défense du bien commun et la création de comités sociaux, est couronné par la Francisque au cœur de l'hexagone.

Le 24 avril 1941, le 1er mai est officiellement désigné comme la « Fête du travail et de la concorde sociale » et devient chômé et payé à l'instar de ce qui a été institué par Hitler en 1933. Coïncidant avec la Saint-Philippe, remarquable instrument du culte à Philippe Pétain, elle veut être un hymne à la gloire du travail et rallier les ouvriers au régime de Vichy. L'extrait « Je tiens les promesses même celles des autres » du discours valorise l'efficacité de Pétain qui améliorerait la législation des assurances sociales, contrairement au gouvernement précédent issu du Front populaire. Dans les faits, les droits des salariés sont restreints avec la suppression du droit de grève et la dislocation des confédérations syndicales. L'iconographie réunit l'ordre militaire, représenté par le bâton du maréchal, et l'ordre ouvrier avec l'enclume du maréchal-ferrant.

Entre capitalisme et communisme, la Charte du travail du 4 octobre 1941 ouvre la voie du socialisme vichyste. Le régime a pour objectif de faire disparaître la lutte des classes dans la société française en imposant le principe de la corporation à toutes les branches d'activités et en favorisant l'entente entre les salariés et les patrons. La lutte des classes n'étant plus de mise, la grève tout comme le lock-out sont interdits et les syndicats dissouts. L'État autoritaire combat un libéralisme excessif et fixe les prix et les salaires. Dans les faits, la pénurie et la hausse des prix favorisent l'hostilité des ouvriers et compromettent le succès de cette réforme. La campagne qui lance la Charte est affichée dans les deux zones du 5 au 20 avril 1942.

Pétain, en uniforme et portant le képi, est ici en gros plan ; son regard austère nous fixe. L'iconographie délivre un message clair : Pétain est le militaire exemplaire et victorieux de la Première Guerre. Il est le chef hors du commun qui protège les Français. La citation en légende de l'iconographie double et souligne le slogan. En bas, la signature manuscrite est celle de Pétain.

Le Maréchal Pétain en buste est sur fond bleu. Il porte, sur fond rouge, au niveau du cœur, une famille en désarroi, composée des trois générations. Les trois couleurs du drapeau sont présentes ; répondre à l'injonction du maréchal est un devoir patriotique. Les deux bandes noires qui barrent la photo du maréchal restent sans explication à ce jour.